samedi 25 février 2012

Une journée un peu dure : visite des Killing Fields et de S-21

Nous arrivons à Phnom Penh vers 1h du matin. Un tuk-tuk nous attend déjà et nous emmène dans une guesthouse un peu en dehors du centre. Nous nous endormons rapidement mais sommes également très vite réveillés par les aboiements du chien du voisin (que Nathan essaye même de tuer à coups de jets de pierre mais rien n’y fait, ce chien est trop con !) et par les cris des enfants qui jouent juste devant notre fenêtre. En gros, une bonne petite nuit bien comme on les aime !
Nous décidons de commencer la visite de la capitale par le plus amusant (…) : les Killing Fields et la prison S-21.


C’est très dur à voir, nous sommes tous les trois très touchés par ce que nous visitons.
Le site des Killing Fields de Choeung Ek dans la banlieue de la capitale est un grand champ où ont été retrouvés des milliers de cadavres (certains avancent l'hypothèse de 20.000) enterrés dans des fosses communes.
En effet, durant la période des Khmers Rouges de 1975 à 1978, le pays et ses habitants ont été complétement dévastés. En moins de 3 jours, les Khmers Rouges ont vidés les villes de leurs habitants (hommes, femmes, enfants, vieux, handicapés,…) pour les envoyer au travail forcé dans les campagnes. Ils ont également tué tous ceux qui auraient pu se mettre sur leur passage ou qui incarnaient la société "nouvelle" (instituteurs, scientifiques, stars de la télévision, hommes du gouvernement,… bref, les « intelligents ». Il suffisait de porter une paire de lunettes pour être catégorisé). Ils voulaient en fait que tous les cambodgiens retournent au travail de la terre et reforment le « peuple ancien ».

Ils ont ainsi tué  environ 2 millions de personnes (sur une population de 8 millions d’habitants) pendant ces trois ans. Les gens sont morts de maladies (malaria et dysenterie), d’épuisement (ils travaillaient environ 17h par jour), de faim (les repas consistaient en un bol de riz par jour) et bien sûr, les assassinats.
Après avoir été torturés et enfermés pendant des jours dans la prison S-21, les prisonniers étaient conduits dans ce champ pour être liquidés quasiment dès leur arrivée. Ils arrivaient les yeux bandés par camion au beau milieu de la nuit, étaient répertoriés sur une liste (pour être sûr que tout le monde soit là et qu’aucun n’ait réussi à s’échapper, on les comptait avant et après la mort) et ils attendaient dans une petite cabane en bois dans le noir complet.


Ils ne savaient bien sûr pas qu’ils allaient se faire exécuter. Et on ne les tuait pas d’une balle dans la tête, car les balles étaient chères, mais à coup de bambous, de matraques, d’essieux, de marteaux ou de pelles. Certains prisonniers n’étaient même pas encore morts lorsqu’on les poussait dans la fosse. Pour les achever et masquer les odeurs de putréfaction, les Khmers Rouges aspergeaient le caveau de DDT, un insecticide employé par les fermiers de la région dans les rizières alentour. 
Dans la région pousse une espèce de palmier qui est utilisée traditionnelement par les paysans. La tranche des tiges des feuilles est pourvue de sortes de dents de scie super acérées. Les fermiers l'utilise comme lame pour égorger les poulets. Hé bien ici ce sont les prisonniers qui ont été parfois égorgés de la sorte. J'ai passé mon pouce sur le tranchant, et il faut vraiment pousser très fort et à de nombreuses reprises pour commencer à voir des rougeurs apparaîtrent!



Pendant tout ce temps, des chants communistes se mêlaient au bruit du générateur pour couvrir les cris. Les fermiers qui habitaient autour de la zone ne se doutaient bien sûr pas de ce qu’il se passait à l’intérieur, car le champ était entouré de hauts murs et de fils barbelés. Ils pensaient simplement qu’il s’agissait d’une base militaire. 


Lorsque les Khmers Rouges ont quitté les lieux, et que les fosses ont été découvertes, les gens ont remarqué qu’il y en avait des dizaines et des dizaines. Dans une fosse ont été découverts des cadavres sans têtes et portant tous les mêmes habits militaires avec l’écusson du KTM. Il s’agissait des corps de cadres Khmers Rouges et de déserteurs, car à la fin, Pol Pot, le leader, devint paranoïaque et tua même ses propres soldats.


Lorsque les premiers hommes sont entrés sur le site, ils ont tout de suite remarqué, en plus des fosses remplies de bouillie humaine en putréfaction et de crânes avec des bandages autour des yeux, un arbre avec du sang et de la cervelle. Ils se sont demandés ce qui s’était passé ici avant d’ouvrir la fosse située juste à côté : elle contenait les cadavres de femmes et d’enfants. Les Khmers Rouges, avant de tuer les mères, empoignaient les bébés par les jambes et les balançaient contre l’arbre jusqu’à ce que leur crâne éclate… Terrifiant !
 


Nous faisons donc le tour de ce champ, avec sur les oreilles l’appareil audio qui nous aide à comprendre ce qui s’est passé ici. Nous passons devant plusieurs de ces fosses, aujourd’hui quasiment rebouchées. Des dents, des os, des vêtements remontent encore tout doucement à la surface. Il est bien entendu demandé aux visiteurs de ne pas y toucher, les employés les ramassent tous les mois pour les mettre dans de grandes urnes vitrées.



Nous faisons le tour du lac, écoutant avec tristesse les différentes histoires des survivants qui ont perdus enfants, parents, frères, sœurs et amis…
Au centre du champ a été créé un stupa qui abrite les crânes, les crânes, os principaux et les vêtements préservés sur une étagère de 17 étages. Les autres ossements ont été laissés en terre. De plus, le stupa étant déjà trop petit, de nombreuses fosses sont restées inviolées.



En fait, cela nous rappelle beaucoup le génocide des juifs par les nazis en 40-45. On retrouve vraiment beaucoup de points communs entre tous les génocides : le travail forcé, la méconnaissance de ce qui se passe pour le reste du monde, la découverte de fosses communes, les camps de travail,…

Nous allons ensuite voir la prison S-21, là où étaient enfermés et torturés ces pauvres gens avant de se retrouver aux Killing Fields.

Il s’agit en fait d’une école, que les Khmers Rouges ont transformée en prison. Il y a quatre bâtiments principaux de trois étages : le premier comporte de grandes salles où étaient entassés les prisonniers et qui servaient soit de cellules, soit de salles de tortures. Les deux autres bâtiments sont un peu différents en ce sens que les Khmers Rouges ont divisés les salles de classe en cellules de bois ou de briques de 80cm sur 2mètres.


Dans le premier bâtiment, nous pouvons voir les lits, les boites à munition dans lesquelles les détenus faisaient leurs besoins et les instruments qui ont servis à donner la mort, ainsi que des photos des derniers corps retrouvés. Lorsque les Vietnamiens (ce sont eux qui ont délivrés le pays) sont entrés pour la première fois dans la prison, ils y ont découvert 14 corps torturés en putréfaction, dont celui d’une femme. Ce sont là les dernières victimes des Khmers Rouges qui, pressés de s’en aller, ont vite fini le boulot. Les Vietnamiens ont donc pris des photos de ces corps, comme preuves et témoignages de ce qui s’est passé ici. Ils ont aussi découvert quelques survivants mais apparemment, leur nombre n’est pas précis.




Dans les deux bâtiments centraux, nous suivons l’histoire : les photos de tous les prisonniers passés par la prison (car chaque détenu était méticuleusement photographié et répertorié à son arrivée), les méthodes de torture (on explique que la potence au milieu de la cour servait à suspendre les détenus en leur accrochant les bras derrière le corps et en les levant par les poignets jusqu'à ce qu'ils perdent connaissance, on leur trempait ensuite la tête dans des jarres remplies de purin), les photos des morts, le passé des chefs du gouvernement Khmer Rouge, les histoires des survivants,…




La liste des faits qui incombent aux chefs du gouvernement Khmers Rouges est longue : crime de guerre, crime contre l’Humanité, génocides, tortures,… Et ceux-ci n’ont même pas encore été jugés ! Pol Pot, lui, est décédé il y a quelques années de sa belle mort, entouré de ces petits enfants, en exil en Thaïlande.






Enfin, après ces deux visites quelque peu éprouvantes moralement, nous allons voir le Central Market, un énorme dôme où se côtoient bijoux, vêtements, souvenirs et nourriture. C’est vraiment énorme ! Nous trouvons une madame qui vend des tarentules grillées (on n'a pas goûté cette fois-ci) et des ruches à miel que les gens croquent comme des friandises (avec la cire et les larves dedans).
On trouve aussi un magasin de robes rien que pour Elise, elle serait trop belle là-dedans!

 
 

Nous allons ensuite manger une bonne grosse glace ! Miaaaaaaaaam !
Après avoir fait le tour du shopping (et avoir acheté un T-Shirt et de nouvelles boucles d’oreilles, pas grand-chose mais bon, la mode cambodgienne est bizarre ! J’attends Ho Chi Minh avec impatience !), nous rentrons à pied et mangeons dans un sympathique petit resto.

Prochaine étape: Visite de la capitale

Nathan et Virginie

Lien vers album:
2012-02-25&26 Phnom Penh

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